L Expérience de mutation de paradigme chez le chercheur
464 pages
Français

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L'Expérience de mutation de paradigme chez le chercheur , livre ebook

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Description

Le concept de paradigme, et son corollaire le changement de paradigme, ont été posés par l'épistémologue et historien Thomas Kuhn qui observait les progressions de la connaissance au fil du temps. Le processus cyclique qui l'a rendu célèbre procède surtout d'une analyse sociétale des « tensions essentielles » entre idées neuves et pensées dominantes. Le chercheur apparaît dans ses comportements socio-culturels et c'est en tant que membre d'une communauté de pensée qu'il intervient sur l'échiquier du changement. Mais ce qui se passe en lui, les déterminants de ses choix, les motifs et ressorts de ses orientations, ne sont pas documentés, limitant notre compréhension de ces moments subtils qui signent l'amorce d'une mutation collective. Ce qu'il vit face à la nouveauté, aux incongruités qui bousculent l'ordre établi, à l'insolite ou l'improbable voire l'invraisemblable, les risques qu'il prend, les obstacles qu'il affronte, les peurs qu'il défie pour soutenir une idée neuve, toutes ces dimensions d'une expérience souvent reléguée dans les sphères de l'intime, forment le socle de l'émergence d'un nouveau paradigme, la première goute d'une tâche d'huile. Le parti de cette thèse est d'interroger cette expérience chez des chercheurs ayant vécu une mutation de paradigme, c'est-à-dire ayant vécu un renversement radical de leur référentiel de chercheur pour entrer dans une nouvelle manière d'appréhender le monde.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 juillet 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342154559
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'Expérience de mutation de paradigme chez le chercheur
Anne Lieutaud
Connaissances & Savoirs

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Connaissances & Savoirs
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
L'Expérience de mutation de paradigme chez le chercheur
 
© 2014, Anne Lieutaud, ALL RIGHTS RESERVED
Avec l’aimable autorisation de :
Selçuk Erdem (www.penguen.com) : Dessin humoristique Rhinocéros (fig 1)
Creative Commons (CC-BY-SA-2.5) : Gravure Flamarion (couverture et fig 2)
 
Rien n’est dans les choses, mais tout est dans la manière d’entrer en relation avec les choses
Danis Bois
 
À mes maîtres sur le chemin,
 
Au Temps, à l’Espérance et à l’Amour, qui seront toujours là pour ramener la pensée au cœur de son humanité vivante, mouvante et émouvante, Sensible et habitée.
 
Remerciements
L’expérience d’une thèse est une aventure collective. Elle a d’abord été rendue possible par Thierry Rieu et Gabrielle Bouleau qui ont œuvré pour qu’elle soit reconnue par AgroParisTech et l’UMR GEAU. Je les en remercie. Ma reconnaissance profonde va également à Thierry Rieu et Sophie Richard pour leur soutien sans faille tout au long de ce parcours, malgré les difficultés occasionnées. Et puis, discrètement, efficacement, d’une manière ou d’une autre, beaucoup m’ont aidé. Chaque fois, ce fut si précieux. Myriam, Francine, Valérie, Pierre-Yves, etc. A chacun d’entre vous, merci infiniment !
L’expérience d’une thèse est aussi une aventure intérieure, d’autant plus interpelée que le sujet qu’elle traite concerne la transformation expérientielle. Garder le cap est une gageure qui rend l’accompagnement essentiel. Et j’ai été magnifiquement accompagnée. Merci à Didier Austry, mon directeur de thèse, pour sa patience, son respect et ses recommandations toujours justes. Merci à Danis Bois, qui a codirigé cette thèse et dont le guidage dans l’incommensurable m’est un enseignement de tous les instants. Travailler avec lui fut une chance, un honneur. Merci !
Et puis cette thèse n’aurait pas vu le jour sans la précieuse contribution des chercheurs qui ont accepté de participer à ma recherche, Tiphaine, Bérénice, Daniel, Farah, Laurent, Judith, Emile, Henri et Jeanne, mais aussi Patrick, Garance, Fabienne et Lydia. Pour leur temps et leur confiance, pour toutes ces parcelles d’une intimité qu’ils ont bien voulu nous partager, merci infiniment !
Enfin, mes remerciements tout particuliers vont à l’équipe du Cerap qui a accueilli cette thèse, ainsi qu’à mes collègues de promotion pour la qualité de nos échanges et la solidarité qui s’est tissée entre nous et m’a nourrie jusqu’au bout.
Mes remerciements très spéciaux, à mes parents dont l’ouverture de cœur et d’esprit et le soutien inconditionnel tiennent pour beaucoup dans l’aboutissement de ce projet. A mes frères et sœurs très aidants dans l’aventure, à mes ami(e)s et mes amours, à Marc, à Claude, à mes Hélène, à Rita, Brice, Bernard, Mireille, et à tous ceux que je ne nomme pas et que mon cœur chérit, je rends ici hommage, pour le soutien, la patience et la fidélité ! Votre présence m’est précieuse. Cette thèse est aussi un peu la vôtre. Merci !
Cette thèse de doctorat a été réalisée au sein de l’Université Fernando Pessoa, Porto Portugal. Encadrée par le CERAP, elle a été rendue possible grâce au soutien financier d’AgroParisTech et l’accueil scientifique de l’UMR G’EAU de Montpellier.
Avant-propos
Figure-toi des hommes dans une demeure souterraine, en forme de caverne, ayant sur toute sa largeur une entrée ouverte à la lumière ; ces hommes sont là depuis leur enfance, les jambes et le cou enchaînés, de sorte qu’ils ne peuvent bouger ni voir ailleurs que devant eux, la chaîne les empêchant de tourner la tête ; la lumière leur vient d’un feu allumé sur une hauteur, au loin derrière eux ; entre le feu et les prisonniers passe une route élevée ; le long de cette route est construit un petit mur, pareil aux cloisons des montreurs de marionnettes. Sur cette route, le long de ce petit mur des hommes portent des objets de toute sorte, qui dépassent le mur, et des statuettes d’hommes et d’animaux en toute espèce de matière. (Ces prisonniers) nous ressemblent ; penses-tu que dans une telle situation ils aient jamais vu autre chose d’eux-mêmes et de leurs voisins que les ombres projetées par le feu sur la paroi de la caverne qui leur fait face ? Assurément, de tels hommes n’attribueront de réalité qu’aux ombres des objets fabriqués.
Considère maintenant qu’on détache l’un de ces prisonniers, qu’on le force à se dresser immédiatement, à tourner le cou, à marcher vers la lumière : en faisant tous ces mouvements il souffrira, et l’éblouissement l’empêchera de distinguer ces objets dont tout à l’heure il voyait les ombres. Et si on le force à regarder la lumière, ses yeux n’en seront-ils pas blessés ? N’en fuira-t-il pas la vue pour retourner aux choses qu’il peut regarder, et ne croira-t-il pas que ces dernières sont réellement plus distinctes que celles qu’on lui montre ? Et si par force on lui fait gravir la montée rude et escarpée, et qu’on ne le lâche pas avant de l’avoir traîné jusqu’à la lumière du soleil, pourra-t-il, les yeux tout éblouis par son éclat, distinguer une seule des choses que maintenant nous appelons vraies ? Il aura, je pense, besoin d’habitude pour voir les objets de la région supérieure. D’abord ce seront les ombres, puis les images qui se reflètent dans les eaux, ensuite les objets eux-mêmes. Après cela, il pourra contempler pendant la nuit les corps célestes et le ciel lui-même. À la fin, j’imagine, ce sera le soleil lui-même à sa vraie place, qu’il pourra voir et contempler tel qu’il est. Après cela il en viendra à conclure au sujet du soleil, que c’est lui qui gouverne tout dans le monde visible, et qui est la cause de tout ce qu’il voyait avec ses compagnons dans la caverne. Or donc, se souvenant de sa première demeure, de la sagesse que l’on y professe, et de ceux qui y furent ses compagnons de captivité, ne crois-tu pas qu’il se réjouira du changement et plaindra ces derniers ?
Et s’ils se décernaient alors entre eux honneurs et louanges, s’ils avaient des récompenses pour celui qui saisissait de l’œil le plus vif le passage des ombres, qui se rappelait le mieux celles qui avaient coutume de venir les premières ou les dernières, penses-tu que notre homme fût jaloux de ces distinctions, et qu’il portât envie à ceux qui, parmi les prisonniers, sont honorés et puissants ? Ne préférera-t-il pas mille fois n’être qu’un valet de charrue, au service d’un pauvre laboureur, et souffrir tout au monde plutôt que de revenir à ses anciennes illusions et de vivre comme il vivait ?
Imagine encore que cet homme redescende dans la caverne à son ancienne place : n’aura-t-il pas les yeux aveuglés par les ténèbres en venant brusquement du plein soleil ? Ne prêtera-t-il pas à rire à ses dépens, et ne diront-ils pas qu’étant allé là-haut il en est revenu avec la vue ruinée, de sorte que ce n’est même pas la peine d’essayer d’y monter ? Et si quelqu’un tente de les délier et de les conduire en haut, et qu’ils le puissent tenir en leurs mains et tuer, ne le tueront-ils pas ?
Planton – Dialogues – Livre II – mythe de la caverne (Extraits)
Introduction
Ma recherche doctorale trouve sa source dans une expérience inattendue que j’ai faite au cours de mon master de recherche en psychopédagogie perceptive, qui abordait la thématique du « devenir praticien-chercheur » 1 auprès d’une population de praticiens de l’accompagnement se formant à la recherche qualitative. Ce travail qui s’inscrivait dans le courant de la recherche-formation m’a conduite à revisiter mes référentiels scientifiques et plus loin, ma vision du monde.
Ma rencontre avec cette nouvelle épistémologie et sa pertinence scientifique a eu l’effet d’un choc profond, dans la mesure où je me trouvais face à de grandes tensions intérieures, tant ma représentation de la recherche scientifique était ancrée dans un paysage épistémologique bien établi : « Le paysage épistémologique dans lequel les chercheurs évoluent met en scène des représentations de la science historiquement construite et située, porteuse de légitimités différentes » (Dayer, 2010, p. 51). En référence à cette expérience, je m’étais progressivement forgée l’hypothèse suivante : tout changement paradigmatique génère nécessairement un « choc » que je supposais être de nature épistémologique . J’ai donc repris à mon compte l’interrogation posée par Dayer : « Comment les chercheurs et les chercheuses construisent-ils et modifient-ils leurs postures de recherche ? Plus précisément, de quelle façon vivent-ils les expériences de tensions et quelles significations leurs donnent-ils ? » (Ibid ., p. 39).
Cette dynamique réflexive renvoie à la notion de changement très présente dans la littérature spécialisée. Dans son acception générale, le changement convoque tout un ensemble de termes satellites qui apportent des nuances ou des éclairages particuliers. Les principaux rencontrés sont la transformation, le renouvellement, la rupture, auxquels on peut ajouter les notions de reconfiguration, métamorphose, conversion, métanoïa, ou encore enrichissement, altération, évolution, mutation. Je développerai dans mon champ théorique chacun de ces termes satellites pour mieux cerner les contours de la notion de mutation que je souhaite tout particulièrement étudier. En effet, la notion de mutation paradigmatique, à ce stade, mérite d’être précisée, détourée, clarifiée, et je propose de la construire sur la base de témoignages expérientiel

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