Etna
100 pages
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Description

« Les pensées de l’homme dérivèrent entre des courants venus du passé, incapables de crever la surface du présent. »


1993. Au bout d'une course qui l'emporte à travers l'Europe, Ulysse échoue au pied de l'Etna, dont l'éruption bouleverse la Sicile. Anéanti par le drame qu'il a vécu, ballotté par les événements, il se laisse entraîner sans réagir dans une spirale de violence, entre misère et corruption, prostitution et crime organisé. Puis il rencontre Sandra, une femme bannie pour avoir transgressé la loi du silence qui règne sur l'île. Ulysse retrouve avec elle le courage de vivre, mais parviendront-ils à échapper au piège qui se referme sur eux ? Le volcan gronde...


ETNA est un thriller mettant en scène la fuite hallucinée d'un homme confronté à son passé.



Gérard Lecas est scénariste, écrivain et traducteur. Il est l'auteur de 13 romans publiés notamment dans la Série Noire de Gallimard, chez Flammarion ou Rivages. Son roman L'ennemi public n°2 a été adapté en film.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 octobre 2022
Nombre de lectures 0
EAN13 9782384390502
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0022€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

COLLECTION NOIRE & SUSPENSE
 
 
 
Crédits photographiques : Pixabay & Unsplash - Rezasaad
Composition du livre : Valentine Flork / Les éditions d’Avallon
 
Distribution papier / numérique : SODIS & Immatériel
 
ISBN papier : 9782384390496
ISBN numérique : 9782384390502
 
2ème édition
 
Dépôt légal : octobre 2022
 
Éditeur : Les éditions d’Avallon
342 rue du Boulidou
34980 Saint-Clément-de-Rivière
 
Impression :
BoD, Norderstedt, Allemagne
 
© 2022 Les éditions d’Avallon
 
ETNA
Gérard Lecas
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Etna
 
 
R O M A N

 
 
 
 
 
Du même auteur
 
 
Romans
 
L’Ennemi public n°2 , Gallimard « Série Noire », 1981
Le Seigneur de Makéni , Gallmard « Série Noire », 1986
Overdrive , Gallimard « Série Noire », 1988
Le Syndrome du volcan , Gallimard « Série Noire », 1993
La Vie hors-champs , Denoël, 1994
MLF vaincra, Canaille, 1996
Satanique ta mère , Baleine (publié en feuilleton dans Libération en juillet 1997), 1998
Etna , Denoël, 1998
Cosmic Blues , Flammarion, 1999
Le Corps de la ville endormie , Rivages Noir, 2012
Deux balles , Éditions Jigal, 2020
Le sang de nos ennemis , Rivages Noir, 2023
 
 
Jeunesse
 
Un voleur pas ordinaire , Scrineo Jeunesse, 2012
Un perroquet nommé Rocco , Scrineo Jeunesse, 2012
Un éléphant ça trompe , Scrineo Jeuneusse, 2013
Le cheval de Noël , Scrineo Jeunesse, 2013
Le chien des neiges , Scrineo Jeunesse, 2014
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
La première édition de ce texte est parue en 1998 aux éditions Denoël. Cette réédition a été entièrement revue et corrigée par l’auteur.
 
 
 
 
 
Chapitre 1
 
 
26 septembre 1989
 
C’était sans doute la fin. Il y avait déjà deux jours qu’il avait perçu le bruit comme un élément inhabituel. Non pas qu’il ait réagi d’une manière ou d’une autre, ou qu’il ait tenté d’analyser le phénomène. Encore moins d’intervenir. Son cerveau avait enregistré la donnée à l’état brut, une plate photocopie du réel, sans la moindre conséquence. Le monde extérieur avait cessé pour lui d’être signifiant, une toile de fond sur laquelle il se déplaçait continuellement sans jamais s’y intégrer. La femme qui était à ses côtés ne démontrait pas davantage d’intérêt. Elle ne bougeait pas. Elle flottait, incertaine.
Le bruit se contentait ainsi de l’accompagner, une présence nouvelle venue du moteur de la Renault 20 dont il troublait le ronflement, inexistant à force de monotonie, d’un staccato sec et précipité. Il avait eu pour la première fois conscience de ce léger déchirement du tissu sonore alors qu’il contournait la baie de Naples en suivant un large crochet autoroutier à l’intérieur des terres. Le spectacle du grand volcan l’avait un instant distrait du tapis asphalté qui fuyait sous ses pieds et dans les plis duquel son regard s’enroulait sans fin. Un immense nuage de fumée grise s’élevait au-dessus du géant, filtrant la lumière et baignant tout l’arrière-pays d’une lueur sale. Pourtant, la nuée ne montait pas du cratère, mais transpirait des flancs du Vésuve, comme s’il exhalait par mille pores la fournaise de ses entrailles. Des forêts entières brûlaient sur le versant continental de la montagne, des incendies inaccessibles, inextinguibles. Dans le lointain, des broussailles bordant l’autostrada étaient la proie des flammes et les quatre voies semblaient disparaître dans les volutes rouges et noires. Il ne ralentit pas, il pensa que le bout de la route était atteint. Son pied pressa pourtant l’accélérateur, il se sentit soulagé, résolu, et la femme à ses côtés fut soudain plus proche de lui. Il allongea le bras pour la toucher, et sa main erra autour de ses formes. Il roula encore, loin, longtemps. Le rétroviseur renvoyait l’image d’une longue traînée d’asphalte bordée d’une haie de lauriers roses.
L’intensité du bruit ne cessait de s’accroître depuis qu’il avait abandonné l’autoroute, à cause des travaux. Il contourna une barrière rouge et blanche censée bloquer le passage, négligea de lire l’avertissement écrit à la main sur une pancarte. Il opta à l’instinct pour cette direction. Le sud, toujours plus au sud. La voie secondaire grimpait dans l’intérieur des terres en s’éloignant de la mer, le contraignant à pousser les rapports de la boîte de vitesses. Un cliquetis asynchrone se superposait à l’explosion des cylindres, au roulement des pneus sur un bitume de plus en plus mal entretenu à mesure qu’il s’enfonçait vers la montagne. Il pensait « la montagne », mais il savait qu’elle n’était pas non plus une montagne ordinaire. Il l’avait vue brûler et s’enflammer depuis les rives de la Calabre, longtemps après qu’il eut oublié le Vésuve derrière lui. L’autre montagne l’attendait.
À nouveau, des fumées obstruaient la voie, des bancs de vapeur lourde dont les relents s’infiltraient à l’intérieur du véhicule. Soufre et carbone, poêles à charbon de sa grand-mère, souvenirs d’enfance. D’une main fébrile, l’homme tenta de clore hermétiquement toutes les bouches d’aération de la voiture, mais il fut distrait par un groupe de gens avançant en désordre sur la chaussée, des femmes tirant des enfants par la main, des vieillards se soutenant mutuellement. Il dut ralentir. Il ne voulait pas ralentir. Il alluma les phares, car l’épaisseur des fumées avait soudain gommé toute la lumière du jour. Un roulement de crécelle le fit sursauter. Une pluie de particules sombres s’abattait sur la carrosserie, comme un orage de grêlons secs. Devant lui, une forme surgit puis s’évanouit en laissant la traînée d’un cri d’effroi. Il eut à nouveau la certitude d’approcher la fin, le centre immatériel du monde où convergent un jour toutes les routes empruntées par les vivants. Les particules s’écrasaient sur le pare-brise et se désagrégeaient en une poussière grise et fine. Pluie de cendres.
Il ralentit encore et la voiture se mit à tressauter violemment sur ses amortisseurs. L’homme perçut dans son corps le grondement montant du sol. Soudain, un visage de vieille femme se plaqua au pare-brise, nez et lèvres écrasés contre le verre, regard d’aquarium, fichu sombre qui avait glissé sur le front en emportant une mèche de cheveux blancs. Par réflexe, il bloqua les freins. La vieille tenta de se relever, tandis qu’une ivresse incontrôlable lui contestait le sens de l’équilibre. L’écho d’une explosion roula sur la montagne et l’onde de choc vint percuter la voiture. L’homme enclencha la première et repartit. Il parcourut quelques centaines de mètres au sein d’une brume poisseuse et nauséabonde, tandis que des déflagrations retentissaient à intervalles réguliers. D’autres fantômes au visage de terre filèrent sur les côtés. Peut-être cherchaient-ils à lui montrer la voie juste. La femme qu’il transportait ne voyait rien de tout cela. Parfois, elle fredonnait un air qui venait sonner douloureusement à ses oreilles. La Traviata. Le Trouvère . Ses doigts s’incrustaient dans le volant, ses tempes se faisaient douloureuses.
Sans le moindre signe précurseur, le brouillard disparut et la voiture émergea de la zone envahie par les fumées. De son regard éteint, l’homme mesura le volume du panache qui l’avait englouti en s’étirant sur plusieurs kilomètres, jusqu’à la mer. Un coude fit obliquer la route et au-dessus de lui, dans un vertige de pente abrupte et de bleu du ciel, une plaie de feu aux veinures pourpres et jaunes tailladait toute la hauteur du versant. Très haut, une gerbe de matières étincelantes s’éleva vers le ciel, si haut qu’elles ne retombaient jamais. L’homme dut faire un brusque écart pour éviter un amas de pierres obstruant à demi le passage. Au-delà, plusieurs véhicules stationnaient en désordre au milieu de la voie, bloquant le passage. Il n’eut pas d’autre solution que d’immobiliser la voiture.
Il y avait deux engins tout-terrain à l’aspect vaguement militaire, un car aux couleurs vives arborant l’inscription : « Promenade sur l’Etna ». Des grappes de gens discutaient en agitant les bras. Des silhouettes se pressaient un peu plus haut sur la pente autour d’un appareil qui ressemblait à un télescope et dont l’objectif était braqué sur le sommet de la montagne. Le moteur de la Renault hoqueta doucement, s’étouffa, puis cala. Pendant quelques secondes, il resta agrippé au volant, poursuivant dans un monde virtuel le parcours interrompu. Son souffle s’expulsait par saccades précipitées, une haleine de coureur achevant une longue course. Sur le siège voisin, la femme s’était dissipée, évanouie, perdant ses couleurs, puis son épaisseur, et à force de transparence, il n’était plus rien resté.
Les pensées de l’homme dérivèrent entre des courants venus du passé, incapables de crever la surface du présent. Pourtant, la netteté, l’immobilité des roches noires découpées à vif par la lumière turquoise inscrivaient à son intention l’état des choses : le voyage était suspendu.
Il ne parvint pas immédiatement à quitter la cellule fermée de l’habitacle. Il remua les membres avec des gestes lents de grand blessé en rééducation. Il se résolut enfin à abandonner le véhicule. Un vertige lui emporta la tête quand il mit pied à terre. Un homme revêtu d’un uniforme vert, chaussé de brodequins et coiffé d’une casquette à longue visière où figurait la mention « guide de l’Etna » rassemblait les groupes épars.
— Allons-y, on n’est pas en avance !
Une grosse Lancia pointa le nez derrière la R20, la contourna avant de venir piler devant l’autocar. Le conducteur abaissa la vitre pour interpeller le guide. La route était bloquée plus bas, on était en train de la dégager. Les voitures devraient attendre ou faire demi-tour. Attendre, il ne pouvait pas, faire demi-tour encore moins. Il avança en laissant sa main glisser sur la carrosserie de la Renault, puis continua d’un pas titubant jusqu’au groupe de touristes. Deux hommes habillés de combinaisons brillantes vinrent à la rencontre des guides. I

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