Colette : Son univers . Sa modernité . Son influence

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Description

Toujours sur le qui-vive, Colette tissa la toile de ses écrits entre délices de l’enfance, fascination de la nature, amour de la vie et outrage à la morale bourgeoise. Au fil de ses livres, une fois Claudine dégourdie, elle reprend inlassablement les mêmes motifs, tisse une toile qui a pour cœur la figure de sa mère et dont elle ne s’éloigne méthodiquement que pour mieux y revenir, par le biais des animaux, des menues aventures du quotidien, ou de quelques épices scandaleuses.
Son univers
Sa modernité
Son influence
Dossier de 48 pages extrait du meilleur des archives de Lire et du Magazine Littéraire, tous droits réservés textes et photos.

Sujets

• Lettres et linguistique

Informations

• Publié par: Lire Magazine
• Date de parution: 06 mai 2024
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782383430070
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 22 Mo

Extrait

n° 12

Colee . Son univers . Sa modernité . Son influence

HORS-SÉRIE COLETTE

LIRE Société éditrice :EMC2 SAS Au capital de 325 000 euros. 15 rue de la Fontaine-au-Roi, 75011 PARIS Téléphone :01 47 00 49 49 RCS Paris 832 332 399

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Maquette Élise GODMUSE  olo.éditions

N° de commission paritaire : 0625 K 85 621

ISSN N°2728-6762 Crédit photos de couverture : collection Maison de Colette. Photos de Roger Schall et Pascal Lagneau. Dessin de Sem.

Illustration du portrait de B. Liger Sébastien HARDY

Édito BAPTISTE LIGER

l ne suffit pas d’aimer les chats. Mais l’intérêt pour les félins peut faire partie intégrante de votre légende, comme un véritable symbole de r I appelonsle, Sidonie Gabrielle Colette. Pourquoi commencer ce texte votre identité. Et s’il y a bien une femme de lettres connue pour sa passion des matous, c’est sans nul doute Colette – de son vrai nom, par cette considération d’ordre zoologique? Parce sa vie et son œuvre ont tout du côté insaisissable, libre et élégant des félidés, ce qui explique peutêtre l’intérêt sans cesse renouvelé des lecteurs pour ses livres, de la série desClaudineàSidoen passant parL’Ingénue libertine,Chériou,bien sûr,La Chatte.Qu’ils soient amis des bêtes ou pas,nombreux (plus de 240) ont été les lecteurs deLire Magazine littéraireà avoir répondu à notre appel pour sauver la maison natale de Colette, à SaintSauveurenPui saye (Yonne), qui relève de notre patrimoine culturel. À cette occasion, nous offrons donc à tous les contributeurs ce dossier numérique,composé de quelquesuns de nos meilleurs articles consacrés à l’autrice deGigi. Pour les besoins de cette édition, La Maison de Colette nous a d’ailleurs accompagnés en mettant à disposition de nombreux documents issus de son très riche fonds d’archives (photos, lettres, manuscrits…). Audelà des remerciements, espérons que ces quelques pages vous donnent, si besoin était, l’envie de replonger dans tous les ouvrages, fameux ou plus obscurs, de cette sacrée dame de la littérature française. Qui disait d’ailleurs, comme une leçon à ne jamais oublier :« L’heure de la fin des découvertes ne sonne jamais. »

2 • C O L E T T E •L E S C O L L E C T I O N S L I T T É R A I R EL I R E M A G A Z I N E

ÉDITION SPÉCIALE COLETTE

Éditorialpar Baptiste Liger ...............................................2

Plutôt araignée que chatpar Jean-Louis Hue ............ 4

Chronologiepar Françoise Burgaud............................... 5

Le pays de Claudinepar Louis Doucet....................... 12

Sido, Colette, mère et fille l’une de l’autre par Michèle Sarde ............................................................. 15

Petit défilé des personnagespar Jacques Dupont.. 19

L’écriture hermaphroditepar Pierre Kyria............... 23

Patronne, secrétaire ou collaboratrice des ateliers Willypar François Caradec ......................26

Le parc zoologique..................... 30par Marcel Bisiaux

 Le jardinage lie les yeux et l’esprit à la terre  par Jean-Louis Hue ........................................................... 34

Cette édition spéciale a été réalisée à partir d’une sélec tion d’articles deLireet duMagazine littéraire* dans le cadre de la campagne de soutien deLire Magazine litté- rairepour la maison natale de Colette, fragilisée par la crise sanitaire. Vous avez été nombreux à répondre à notre appel :merci pour votre soutien, vos partages et vos encouragements tout au long de la collecte.

Collection maison de Colette

Au plaisir des senspar Françoise Burgaud................ 36

La dame à la jumellepar Gilles Costaz ..................... 39

George Sand, Colette, deux femmes libres et scandaleusespar Marie Gobin et Vanessa Postec......42

Bibliographie................................................................. 48

La rédaction deLire Magazine littéraireest heureuse de pouvoir, grâce à vous, aider la maison natale de Colette à hauteur de 7500 euros.Un soutien qui permettra d’avancer dans l’installation et la mise en valeur des archives et la sauvegarde du lieu. Pour suivre l’actualité de la maison et continuer à les aider : www.maisondecolette.fr Belle découverte de ce numéro!

* Ces articles sont parus dans les n° 325 deLire (mai 2004) et n° 266 duMagazine littéraire(juin 1989).

L E S C O L L E C T I O N S L I R E M A G A Z I N E L I T T É R A I R E•C O L E T T E• 3

SA VIE, SON ŒUVRE

PLUTÔT ARAIGNÉE QUE CHAT

Toujours sur le quivive, Colette tissa la toile de ses écrits entre délices de l’enfance, fascination de la nature, amour de la vie et outrage à la morale bourgeoise. Le lecteur, sous le charme, ne se lassera pas de la redécouvrir.

’il fallait privilégier un animal dans le bestiaire de Colette, je délaisserais un instant les Chaq S ue nuit, vers 3 heures, quand l’in chats pour retenir une arai gnée. Son fil conduit tout droit à Sido, qui en héber geait une dans sa chambre à coucher. somnie lui faisait rallumer la veilleuse près de laquelle tiédissait un bol de cho colat, l’insecte venait boire sa ration quo tidienne puis, acrobate au ventre lourd, rejoignait ses cimaises. L’heure de l’arai gnée venait de passer. Sido continuait à lire, régnant sur l’infini domaine de la nuit où sa fille rêvait de se tailler son propre

fief. Car Minetchéri ne dormait pas. Elle était déjà sur le quivive. DansLa Maison de Claudine,Colette raconte qu’elle demandait toujours à sa mère des nouvelles de l’araignée lors qu’elle revenait à SaintSauveur. Le fil de l’histoire conduit cette fois à l’écri vaine. Délices de l’enfance, du chocolat chaud, des vagabondages nocturnes. Plaisir, aussi, de tisser une toile où elle piégerait bien davantage que des mouches, mais des papillons, des amants, quantité de bleus, des printemps qui se font attendre et des automnes où s’at tarder, et aussi, à l’opposé de ces exi gences saisonnières, des bonheurs qui

Colette en famille vers 1880, une des rares photos de famille prises à SaintSauveur.

4 • C O L E T T E •C O L L E C T I O N S L I R E L E S M A G A Z I N E L I T T É R A I R E

ne respectent pas l’ordre des choses, défis contre la routine quotidienne et la morale bourgeoise, adultères, collages incestueux, personnages androgynes.

Faussaire de la nostalgie Cette entreprise arachnéenne, la publi cation desŒuvres complètesde Colette que Françoise Burgaud a rassemblées avec amour et érudition en révèle toute l’ampleur (BouquinsLaffont, 2004). Au fil de ses livres, une fois Claudine dégour die, Colette reprend inlassablement les mêmes motifs, tisse une toile qui a pour cœur la figure de sa mère et dont elle ne s’éloigne méthodiquement que pour mieux y revenir, par le biais des animaux, des menues aventures du quotidien, ou de quelques épices scandaleuses. Parfois, comme à plaisir, elle laisse le temps corrompre son travail; fantastique faussaire de la ruine et de la nostalgie, elle célèbre le renoncement à l’amour alors qu’elle vit une grande passion (c’est tout le jeu secret deLa Naissance du jour)ou elle rédige de chic une sorte de testament littéraire –L’Étoile Vesper– qui sera pourtant suivi de quatre autres livres. Quel travail opiniâtre, et fascinant, que cet ensemble de tableautins, d’es quisses, de choses vues et senties, que Colette fragmente à loisir, sans jamais perdre le fil de son récit, tout en laissant le lecteur, que le gréement des phrases emprisonne peu à peu, définitivement pris au piège. JeanLouis Hue

BIOGRAPHIE Journaliste et écrivain,JeanLouis Hue collabora auMagazine littérairedès les années 1980 et en prit la direction en 2004.

DR

CHRONOLOGIE

1860, 9 août Un ancien saintcyrien turbulent, le capitaine Jules Colette, âgé de 31 ans, est nommé percepteur à SaintSauveuren Puisaye, dans l’Yonne. Une grave blessure reçue à la bataille de Melegnano, et suivie de l’amputation d’une jambe, a mis fin à sa carrière militaire. Il fait à SaintSauveur la connaissance d’une jeune femme« pas jolie, mais charmante »,Sidonie, épouse de Jules RobineauDuclos, un riche pro priétaire terrien ivrogne, brutal et triste, auprès de qui elle étouffe. Orpheline de mère, elle a été accueillie à 11 ans par ses deux frères, journalistes français vivant en Belgique, d’esprit ouvert et libéral; grâce à eux et au milieu qu’elle a fréquenté, son originalité personnelle et son goût violent de la vie ont pu s’épanouir librement.

1863, 27 janvier Naissance à SaintSauveur du deuxièmeenfantdeJulesetSidonie RobineauDuclos, EdméeJulesAchille, dit Achille. Dans le village, on attribue au charmant capitaine Colette la paternité de l’enfant; le village a peutêtre raison.

1865, 30 janvier Mort de Jules RobineauDuclos. 20 décembre.Mariage de Jules Colette et de Sidonie RobineauDuclos, qui pour son ouveau mari devient tendrement « Sido », nom sous lequel sa fille Colette l’immortalisera.

1866, 22 octobre Naissance du troisième enfant de Sido nie Colette et, pour l’état civil, du premier enfant du capitaine, Léopold, dit Léo.

1873, 28 janvier Dans la grande maison de Saint Sauveur, Sido met au monde, à 38 ans, son quatrième enfant, Sidonie Gabrielle, notre Colette, Gabrielle ou Gabri pour son père et sa mère, « MinetChéri » pour Sido. Commence pour Colette entre ses parents et ses frères une paisible enfance villageoise dans la maison familiale héri tée de Jules RobineauDuclos, avec son « JardinduHaut » et son « Jardindu Bas ». Colette décrira dans toute son œuvre ce paradis enfantin, magnifié par le souvenir. Une demisœur aînée, Juliette Roger Vio R ll o et bineauDuclos, le premier enfant de

Sido né en 1860, celle que Colette appellera« ma sœur aux longs cheveux »à cause d’un système pileux anor malement développé, sera aussi pour elle« l’étrangère aux yeux tibétains »,secrète, déséquilibrée et incomprise. La famille vit simplement, mais confortablement, et Sido ne manqua jamais de domestiques.

1884, 15 avril Juliette épouse le docteur Charles Roché ; le couple conteste la gestion, catas trophique, du capitaine Colette, qui vend peu à peu les biens de sa famille. Juin.Colette est reçue au Colette à 2 ans, vers 1875. certificat d’études primaires. Le bonheur continue pour elle, parce qu’elle n’est pas la grande maison; l’année suivante, toute interne, contrairement à ses frères et la famille part pour ChâtillonsurLoing, sœur et parce que, ainsi qu’il était de où Achille vient de s’installer comme mise à l’époque, elle est tenue dans médecin. l’ignorance des problèmes d’argent qui empoisonnent les relations de Sido et de 1892, novembre sa fille Juliette. Colette est venue à Paris pour y être présentée à la famille de Willy, qui er 1889, 1 et 2 juillet accepte sans enthousiasme cette petite Colette est reçue aux épreuves du provinciale pauvre à l’invraisemblable brevet élémentaire, terme de ses études. accent bourguignon. L’événement serait de faible importance s’il n’était devenu un élément essentiel du 1893, 15 mai premier livre de Colette et Willy,Clau- Mariage à ChâtillonsurLoing de dine à l’école. Willy et Gabrielle Colette, « Colette » 9 septembre.Naissance d’un petit gar pour son mari. Comment Sido, si çon qui va bouleverser la vie de Colette méfiante à l’égard des hommes en et sans doute être à l’origine de sa car général, des maris en particulier, ces rière d’écrivain : Jacques GauthierVil « détrousseurs »qui arrachent les filles lars est le fils de Germaine Servat et à leur famille, atelle pu donner sa fille, d’Henry GauthierVillars, dit Willy (son son« Soleil tout en or »,à cet homme de pseudonyme dans son métier de journa treize ans son aîné, bedonnant et déjà liste), célibataire âgé de 30 ans, fils de chauve, ce Parisien libertin dont la seule l’éditeur parisien, et futur premier mari vertu apparente réside dans l’attention de Colette. Après la mort de sa mère, qu’il porte à son petit garçon ? Mais en 1891, l’enfant sera mis en nourrice, etSaintSauveur n’ouvre aucune perspec la famille de Colette veille sur lui. C’est tive à une fille sans dot – et Colette est ainsi qu’elle rencontre Willy, qui l’éblouit amoureuse. Le couple s’installe à Paris par son parisianisme. dans la garçonnière de Willy, quai des GrandsAugustins, mais quitte dès le 1890, juin mois de juin ce logis« impudique »de Le capitaine Colette et Sido sont oblilibertin pour le 28 de la rue Jacob. Grâce gés de vendre une partie des meubles de à Willy, Colette rencontre le ToutParis

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