L’irréel du passé exprimé par la forme verbale en « -ra » : étude d’un élément de l’état de langue de la Première Chronique générale d’Alphonse le Savant - article ; n°1 ; vol.24, pg 101-121
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L’irréel du passé exprimé par la forme verbale en « -ra » : étude d’un élément de l’état de langue de la Première Chronique générale d’Alphonse le Savant - article ; n°1 ; vol.24, pg 101-121

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Cahiers de linguistique hispanique médiévale - Année 2001 - Volume 24 - Numéro 1 - Pages 101-121
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 2001
Nombre de lectures 377
Langue Catalan

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L’irréel du passé exprimé par la forme verbale en « -ra » : étude d’un élément de l’état de langue de la Première Chronique générale d’Alphonse le Savant 1
L’étude que nous nous proposons de faire n’est pas nouvelle : plusieurs travaux – ouvrages et articles – décrivent et analysent avec soin le déve-loppement singulier qu’a connu cette forme verbale au cours du Moyen Âge, puis à l’époque classique, avant de se confondre, à la fin du XVII e siècle, avec le subjonctif imparfait et plus-que-parfait. Et ces travaux nous ont amené à nous poser différentes questions : pourquoi la forme verbale en « -ra », qui correspondait en latin à un plus-que-parfait de l’indicatif, s’est-elle mise à exprimer un irréel du passé dans certaines circonstances ? Comment cette même forme a-t-elle exercé sa nouvelle fonction dans la langue castillane du XIII e siècle, en nous lais-sant prévoir l’exceptionnel élargissement de son emploi durant les siècles qui suivent ?
1. Pour cette étude, nous avons utilisé les éditions suivantes : ica general de E itada o PSAIÉLDNFAÈOLQNcUSonEO,uEn D l i e a Ss l t o A g u u Bd e Ii s o : O , d a e c P t lra u i a mc l oe i lr z èar a e,c d r ot ó er n xdteeéDtiaebglioeCttAraT sp dA a uL ñ i a tÁ, pNea,rd2Atomeps,rMRaadrmidó:nGMreEdNosÉ,N19D7E7.Z . BOURGERY, 2 tomes, Paris : Les Belles Lettres, 1971. TACITE, Annales, livres IV-VI, texte établi et traduit par Pierre WUILLEUMIER, deuxième tirage revu et corrigé par H. LE BONNIEC, Paris : Les Belles Lettres, 1990. TACITE. Annales, tome III, livres XI-XII, texte établi et traduit par Pierre WUILLEUMIER, deuxième tirage revu et corrigé par J. HELLEGOUARC’H, Paris : Les Belles Lettres, 1994.
 
 L’    La phrase conditionnelle, exprimant en latin l’irréel du passé : si habuis-sem, dedissem , comporte dans la protase et dans l’apodose les mentions de deux procès – la condition et le résultat de la condition – qui n’ont pas existé dans ce passé, et que l’on exprime sous la même forme : « -ssem », plus-que-parfait du subjonctif. Voici donc une structure simple et le modèle sur lequel nous nous basons pour étudier sa première variante, présente dans les exemples qui suivent : Quid ille Priamus ? Non dissimulauit iram et regis genua complexus est, funestam perfusamque cruore filii manum ad os suum rettulit, cenauit ? […] Dignus fuit cui permitteret a conuiuio ad ossa filii legenda discedere ; ne hoc quidem permisit benignus interim et comis adulescens : propinationibus senem crebris ut cura leniretur admonens lacessebat ; contra ille se laetum et oblitum quid eo actum esset die praestitit : perierat alter filius, si carnifici conuiua non placuisset . (Sénèque, De Ira , II, XXXII, 5) Quid ille Priamus ? Non dissimulauit iram et regis genua complexus est, funestam perfusamque cruore filii manum ad os suum rettulit, cenauit ? […] Dignus fuit cui permitteret a conuiuio ad ossa filii legenda discedere ; ne hoc quidem permisit benignus interim et comis adulescens : propinationibus senem crebris ut cura leniretur admonens lacessebat ; contra ille se laetum et oblitum quid eo actum esset die praestitit : perierat alter filius, si carnifici conuiua non placuisset . (Sénèque, De Ira , II, XXXII, 5) Et Priam ? Ne dissimula-t-il pas sa colère ? Et n’embrassa-t-il pas les genoux du roi ? Ne porta-t-il pas à sa bouche une main meurtrière et souillée du sang de son fils ? Ne prit-il pas part au festin ? […] Il eût mérité qu’on lui permît de quitter le festin pour recueillir les os de son fils ; c’est ce que ne lui permit pas le jeune homme malgré ses manières bienveillantes et affables ; il harce-lait le vieillard de fréquentes santés, l’invitant à adoucir son chagrin ; lui, en réponse se montra joyeux et oublieux de ce qui s’était passé ce jour même : l’autre fils était mort si le convive n’avait pas plu au bourreau. Quo alio Fabius affectas imperii uires recreauit quam quod cunctari et tra-here et morari sciit, quae omnia irati nesciunt ? P erierat imperium, quod tunc in extremo stabat, si Fabius tantum ausus esset quantum ira suadebat . (Sénèque, De Ira , I, XI, 5) Par quel moyen Fabius a-t-il relevé les forces défaillantes de l’empire ? Il a su simplement temporiser, faire traîner les choses, y apporter quelque retard, toutes les mesures que les gens coléreux ne savent pas prendre. C’en était fait de l’empire, qui était déjà bien bas, si Fabius avait entrepris ce que lui conseillait la colère. Un procès réel s’est dûment déroulé dans le passé : contra ille se laetum et oblitum quid eo actum esset die praestitit ou Quo alio Fabius affectas imperii uires recreauit quam quod cunctari et trahere et morari sciit ? empêchant l’existence de
        « - »  son contraire, le procès carnifici conuiua non placuit ou Fabius tantum ausus fuit quantum ira suadebat . De plus, comme ce dernier procès est une condi-tion dont dépend l’obtention d’un résultat, cette condition est restée non remplie et son résultat, non produit. Et leurs énoncés constituent une phrase conditionnelle, exprimant un irréel du passé, et qui aurait pu suivre le modèle initial : Peri esset alter filius si carnifici conuiua non placui sset . Peri esset imperium […] si Fabius tantum ausus esset quantum ira suadebat. Si au contraire la condition avait été remplie ou – ce qui revient au même – si l’on n’avait pas annulé son existence, le procès résultat ne pouvait être qu’obtenu, dûment accompli et exprimable sous la forme : perie rat alter filius ou perie rat imperium, plus-que-parfait de l’indicatif, mode et temps du réel par excellence. La première variante consiste à énoncer ce même procès dans l’apodose de la phrase conditionnelle : Peri erat alter filius si carnifici conuiua non placuisset. Peri erat imperium […] si Fabius tantum ausus esset quantum ira suadebat. À l’énoncé du procès résultat sous la forme « -ssem », se substitue donc celui de son contraire, le procès résultat réel sous la forme « -ram ». Or, et c’est ce qui rend possible cette substitution, la condition n’est pas remplie et elle nie l’existence du procès résultat et de ses caractéris-tiques : « obtenu » et « accompli ». Et ainsi, cette nouvelle phrase con-ditionnelle est sémantiquement équivalente à la précédente et sa construction a l’avantage de donner au procès résultat non réel, une apparence de réel. Nous donnons deux autres exemples de cette phrase conditionnelle où l’ordre apodose-protase est inversé : Interim Messalina Lucullianis in hortis prolatare uitam, componere preces, nonnula spe et aliquando ira : tantum inter extrema superbiae gerebat ! Ac, ni caedem eius Narcissus properauisset, uerterat pernicies in accusatorem . Nam Clau-dius, domum regressus et tempestiuis epulis delenitus, ubi uino incaluit, iri iubet nuntiarique miserae […] dicendam ad causam postera die adesset. […] Prorumpit Narcissus denuntiatque centurionibus et tribuno, qui aderat, exsequi caedem : ita imperatorem iubere. (Tacite, Annalium , XI, 37, 1) Cependant Messaline, dans les jardins de Lucullus, cherchait à prolonger sa vie, à composer une supplique, non sans un reste d’espoir et avec des accès de colère : tant elle montrait d’orgueil en cette extrémité ! Et si Narcisse n’avait pas hâté son meurtre, l’affaire s’était retournée contre lui, l’accusa-teur. En effet, Claude rentré chez lui et adouci par un festin prolongé, une fois échauffé par le vin, ordonne qu’on aille signifier à la malheureuse de se présenter le lendemain pour plaider sa cause. Narcisse bondit et enjoint aux centurions et au tribun de garde d’accomplir le meurtre : tel était l’ordre de l’empereur.

 
Erepto Druso, preces ad uos conuerto disque et patria coram obtestor : Augusti pronepotes, clarissimis maioribus genitos, suscipite, regite, uestram meamque uicem explete. Hi uobis, Nero et Druse, parentum loco. Ita nati estis ut bona malaque uestra ad rem publicam pertineant. Magno ea fletu et mox precationibus faustis audita ; ac, si modum orationi posuisset, misericordia sui gloriaque animos audientium impleuerat ; ad uana et totiens inrisa reuolutus, de reddenda re publica utque consules seu quis alius regimen susciperent, uero quoque et honesto fidem dempsit. (Tacite, Annalium , IV, 8, 5) Maintenant que Drusus nous est ravi, je tourne vers vous mes prières et devant les dieux et la patrie, je vous en conjure : ces arrière-petits-fils d’Au-guste, issus d’illustres aïeux, recueillez-les, dirigez-les, remplissez votre rôle et le mien. Quant à vous, Nero et Drusus, voici ceux qui vous tiendront lieu de pères. Dans le rang où vous êtes nés, vos qualités et vos défauts intéressent l’État. Bien des larmes, puis des voeux de bonheur accueillirent ces paroles ; et s’il eût borné là son discours, il laissait dans l’auditoire tous les coeurs emplis de compassion et pénétrés de sa gloire ; mais, en reprenant le propos vain et tant de fois tourné en dérision de rétablir le régime républicain et de confier le gouvernement aux consuls ou à quelque autre, il discrédita même ce qu’il pouvait avoir dit de sincère et de généreux. La dernière variante, qui devait déjà exister en latin, n’entraîne aucune modification dans l’énoncé de la phrase conditionnelle. Elle consiste simplement à reconstituer le modèle initial où la condition et son résultat, tous deux non réels, sont exprimés comme tels. Et cette reconstitution a dû s’effectuer ainsi : les deux procès – condition et résul-tat – ont conservé les mêmes formes : « -ssem » et « -ram », mais la seconde a inversé sa fonction. En effet, le procès résultat étant nécessai-rement non réel, la forme en « -ram » a peu à peu été perçue et comprise comme la marque de ce non-réel et dès lors, le procès résultat s’est vu exprimé comme tel. Et ainsi dans l’apodose, devenue le synonyme de la forme en « -ssem », la forme en « -ram a pu se substituer à elle et en » exercer la fonction. Enfin cette nouvelle phrase conditionnelle est celle que l’on va utiliser, sans grands changements, dans la langue castillane médiévale jusqu’à l’avant-dernière décennie du XIII e siècle.
L               « - »   « - » ,       Le fonctionnement de la phrase conditionnelle exprimant l’irréel du passé est complexe et nous voulons l’analyser en nous basant sur l’exemple suivant : E Pompeyo e Julio Cesar, desque fueron cerca uno dotro et se ueyen ya las compannas de las huestes, quedaron et estidieron en si cada unos aquel dia.
        « - »  Otro dia mannana ordenaron amos los principes sus azes, e fueron grandes los poderes de amas las partes, e lidiaron, et fue la lit muy fuerte et muy ferida, et duro tod el dia fasta acerca de la noch. Pero en cabo uencio Pon-peyo e fuxo el Cesar ; e non quiso Ponpeyo yr mas enpos el ca era ya noch . E tan que-brantado yua el Cesar, que si Pompeyo tras el ouiesse ydo, alcançaral, et ol matara ol prisiera . (p. 79, b 23). Tout d’abord, la phrase conditionnelle ne saurait fonctionner sans la présence d’un réel que nous décrivons ainsi : dans le passé, a eu lieu un procès : e non quiso Ponpeyo yr mas enpos el [ Cesar ]… qui a éliminé l’exis-tence de son contraire : quiso Ponpeyo yr en pos el Cesar …* et l’a donc fait entrer dans la zone du non-réel du passé. Ce dernier procès aurait pu ne pas être exprimé puisqu’il n’a pas existé dans ce passé. Mais il est por-teur d’une information que le lecteur doit connaître : si l’on n’avait pas annulé son existence, et plus précisément, si on l’avait dûment exécuté, il aurait provoqué l’apparition de deux nouveaux procès. Ainsi, l’infor-mation reçoit tout naturellement la formulation de la phrase condition-nelle avec son procès condition : si Ponpeyo tras el (Cesar) ouiesse ydo et ses procès résultats : alcançaral, et ol matara ol prisiera , tous trois non réels dans le passé. Le lecteur reconnaît que ces procès n’ont pas existé, mais il sait aussi qu’ils impliquent la présence d’un procès réel qui, lui, a vraiment eu lieu, même si dans d’autres exemples, il reste sous-entendu. La phrase conditionnelle et son réel peuvent se représenter ainsi :
RÉEL du passé e non quiso Ponpeyo yr mas enpos el (Cesar)
NON-RÉEL du passé si Ponpeyo tras el ouiesse ydo alcançaral, et ol matara ol prisiera.
Le non-réel du procès condition et celui des procès résultats ne se res-semblent guère. Non seulement on les exprime sous deux formes dis-tinctes, « -sse » et « -ra », mais leurs origines sont différentes. Le procès réel et le procès condition non réel forment un système et ils se parta-gent les spécificités suivantes : ils ont tous deux le même contenu séman-
   tique, mais le premier est négatif et le second, positif. Autrement dit, ils ne peuvent coexister et le procès condition est nécessairement un non-réel que nous qualifions d’interne au système. Quant au procès réel et aux procès résultats non réels, ils ne se partagent aucune spécificité et n’entrent pas dans un système. C’est par contrecoup – en « mainte-nant » le procès condition dans le non-réel – que le procès réel empêche l’existence des procès résultats ; et cet autre non-réel peut être qualifié d’externe au système. L’ordre des composants des phrases conditionnelles de ce type pré-sente des variantes : l’énoncé du procès réel est donné en dernier et introduit par la conjonction mas qui remplit sa fonction d’adversatif. Ca bien assi cuemo oyestes que se uio Julio Cesar con Ponpeyo el grand en ora que, si Ponpeyo en la batalla de Duracio sopiesse cuemo estaua Julio Cesar quando se uencio et en pos el ouiese ido, alli fuera Julio Cesar desfecho et perdudo por siempre ; mas ni lo sopo Ponpeyo ni lo fizo, ni cayo otrossi Julio Cesar en aquel quebranto . (p. 91, b 41) Ou encore, c’est l’ordre entier des trois éléments : procès réel, procès condition et procès résultat qui se trouve inversé : En el segundo anno, que fue en la era de cient et treynta et siete, auino assi que ell emperador Nerua endereço en el fecho de Roma et en ell estado dell imperio todo quanto auien mal parado los otros enperadores que fueran ante del, e endereçara mucho mas si uisquiesse ; mas uisco poco en el sennorio . (p. 142, a 8) Enfin, le procès résultat, lorsqu’il est placé en tête de la phrase condi-tionnelle est parfois exprimé sous sa forme composée : ouie ra + p. passé. Et il s’agit toujours d’un procès perfectif dont le déroulement a un terme : Mas quando el conde Fernand Gonçalez sopo que los mas altos omnes daquella una az eran muertos, et que los otros estauan muy arrequexados et tristes, et que serien muy ayna desbaratados si acorro non ouiessen, ouo ende muy grand pesar, tanto que non cato por al sinon por aguijar el cauallo, et diose a andar et metiose por medio de la mayor priessa de los moros , […] et fallolos muy des-baratados, ca o los ouieran presos o muertos si el tan ayna non llegasse . (p. 404, a 29) Et ainsi, cette forme en « -ra » composée doit être comprise comme celle d’un procès résultat qui non seulement aurait pu exister, mais surtout se voir dûment accompli. Il peut y avoir ellipse partielle du procès condition non réel dans la circonstance suivante : on énonce obligatoirement le procès réel qui est toujours exécuté et de ce fait, positif. Quant au procès condition non réel, il ne peut être que négatif et on l’exprime par la locution « si no » :
        « - » 
Et Almançor era ya estonces salido de su tierra con su hueste et uinie pora correr Castiella et astragarla como solie et llego alli a Cannatannaçor, et ellos alli lidiaron, et la lid fue muy grand et muy ferida, de guisa que les duro todo el dia fasta en la noche et nin fincaron uençudos los unos nin los otros. Et finco assi la fazienda por la noche que les vino et los partio, ca sinon Almançor fuera muerto o preso , segund dize don Lucas de Tuy. (p. 449, b 4) Et por que eran cristianos todos della et della part, touo el rey don Sancho por bien, maguer que era muy fuerte rey, que la cristiandat non se perdiesse por tal razon et tan torticera, et mando a los suyos que non firiessen et que estudiessen quedos. Et sobre esto andidieron pleyteses de amas las partes que se par-tiesse el rey don Ramiro por siempre daquella demanda et el rey don Sancho quel dexasse en paz ; si non guisado estaua que muerto o preso fuera y el rey don Ramiro . (p. 496, b 36) Et si le procès résultat est négatif lui aussi, la locution si no se voit rem-placée par l’adverbe ou l’expression adverbiale otramientre ou dotra guisa : Mas despues que la cibdad de Toledo fue metida en poder de los moros – por pleytesia que troxieron con los judios, ca otramientre non la pudieran tomar por fuerça , pero que aquella pleytesia luego la crebantaron ellos – la clerizia et los cristianos, que quisieron y ueuir so el su sennorio dellos et pecharles su tributo, otrogaronles los moros que touiessen su ley et la usasen et uisquiessen segund la cos-tumbre de su fe, e que ouiessen obispos et clerigos de missa, et los otros et las otras ordenes. (p. 325, b 49) E ella [ Dido ] , creyendo que serie assi, conortos ya quanto, e guisol [ a Eneas ] muy bien y enuiol much onradamient ca dotra guisa non se pudiera yr de la tierra dAffrica sino con plazer della , ca ella era sennora de Carthago e de toda la otra tierra en derredor. (p. 39, 18 b) L’ellipse est complète dans l’exemple qui suit : E tantas fueron alli las razones entre los senadores e la cort e el, e las palau-ras fuertes e malas, que en poco estidieron de boluerse ; e fuera y luego fecho grand mal . (p. 65, b 49) L’exécution du procès réel n’a été que sur le point de se faire et ce pro-cès fonctionne donc comme s’il était négatif. Le procès condition, dès lors positif, n’est plus énoncé. Il faut encore signaler que, dans la phrase conditionnelle exprimant un irréel du passé, la forme en « -sse » du procès condition peut être remplacée par celle du gérondif sans que l’ensemble de la construction ne soit altéré : Et el conde non pudo yr de bestia por la montanna tras el puerco, et ouo a descender del cauallo et yr de pie. Et assi como llego, entro por la eglesia et fue all altar alli do yazie el puerco, et quando uio aquel lugar tan onrrado, recelose dell, et non quiso matar el puerco ; et dixo assi como en faziendo
   oracion. « Sennor Dios a quien temen todas las cosas del mundo, tu me per-dona si yo en esta entrada erre, ca non sabia nada de la santidad deste logar, et sabiendolo, non fiziera y enoyo, ante uiniera y en romeria et diera y offrenda . » (p. 393, b 8) Pour conclure, nous dirons que la première phrase conditionnelle étudiée reste encore assez proche de son origine latine puisque les pro-cès condition et résultat conservent les formes en « -sse » et en « -ra ». Toutefois : – le procès condition peut être énoncé sous la forme en « -sse » compo-sée : ouiesse ydo . – le procès résultat, toujours non réel, est parfois négatif : non se pudiera ou encore exprimé sous la forme en « -ra » composée : los ouieran presos pour marquer son aspect accompli.
U            Il faut tout d’abord remarquer que les trois éléments de cette phrase conditionnelle suivent obligatoirement l’ordre : procès résultat, procès condition et procès réel. Et que ce dernier n’est là que pour empêcher le procès résultat d’exister ou de s’accomplir. E todos en uno fueron ferir en la hueste de los romanos, e mataron muchos dellos a marauilla, e los otros fueron uençudos e començaron a foyr tan der-ramada mientre que todos hy murieran que no escapara ninguno, si no fuesse por Cipion que se metio con su companna entre los de la su huest e los de Carthago ; y ell era tan dubdado de los dAffrica e del linage de los Asdrubales, que numqua osaran salir a la parte o ell estaua. E por end quando uieron que el e los suyos los començaron a ferir, tiraron se a fuera e fueron se cogiendo pora la uilla. (p. 47, a 47) El rey Carlos dexo estonce de guerrear los moros et enderesço su hueste contra esos pocos espannoles que fincaran. Et dize don Lucas de Tuy que en veniendo, que cerco a Tudela, et ouierala presa synon fuese por la traycion que fizo y vn conde que andaua en su companna , que auia nombre Galaron, que era de conseio con los moros . (p. 353, a 38) Ainsi, le fonctionnement de cette phrase que nous allons décrire s’écarte assez de celui de la phrase conditionnelle étudiée précédem-ment. L’énoncé des procès résultat et condition nous apprend que, dans le passé, un procès résultat aurait existé : todos hy murieran ou aurait été chose faite : [ Tudela ] ouierala presa si la cause de son non-réel, c’est-à-dire le procès réel, n’avait pas eu lieu. Or il s’est produit. Son énoncé qui fait suite à celui de la condition a bien la forme de la cause : il est sub-stantivé et introduit par « por ». Et sa lecture nous fait connaître l’actant qui par son intervention a empêché le procès résultat d’exister ou de
        « - »  s’accomplir : Cipion que se metio con su companna entre los de la su hueste e los de Carthago ou la traycion que fizo y vn conde […] que era de conseio con los moros . Le schéma qui suit doit mettre en évidence la structure rigide de cette phrase conditionnelle.
NON-RÉEL du passé (Tudela), ouierala presa sy no fuesse por
RÉEL du passé la traycion que fizo y un conde que andaua en su companna (…) que era de conseio con los moros.
L’énoncé de la condition peut devenir partiellement elliptique – la forme verbale fuesse disparaît – sans que le reste de la construction ne soit modifié. La reyna de Leon querie muy grand mal a los castellanos por quel mataran a su padre don Sancho el rey de Nauarra, et punnaua de buscarles quanto mal et quanta desonrra podie. Et quando esto sopo, fue guarida, et auiuaua a los leoneses que peleassen con ellos. Et ouieranse y de matar todos sinon por el rey don Sancho que salio a ellos et departiolos . (p. 417, b 21) El Çid auie dexado vna companna a la puerta que dizen de Alcantara, que mientre que el lidiasse con aquellos del arraual, o eran todos los moros ayu-tados, que ellos lidiassen aquella puerta ; et fizieronlo assy. Quando vieron que toda la gente de los moros estauan a aquella parte o era el Cid, fueron a aquella puerta de Alcantara, et legaron al muro, et ouieran entrado por alli sinon por las mugeres et por los moços que estauan sobrel muro en las torres echando piedras . (p. 570, b 48) De plus, l’énoncé elliptique de la condition si non por peut être remplacé par salvo por : Et el arraez en pasando con su caualleria que leuaua, el maestre salio a el, pero que se le non guiso commo coydaua, ca la çelada estaua arredrada de aquel logar por o el arraez pasaua ; et desque fueron descobiertos, el arraez se fue acogiendo. Pero con todo eso, alcançolo el maestre bien acerca del castiello, et matol y nueue caualleros et a el derribo del cauallo, et ouieralo a prender saluo por el poder de la gente quel acorrio de todas partes : los vnos que salien
   del castillo a acorrerle commo estaua acerca, los otros que se yuan con el et que punnauan en lo defender quanto podian. (p. 753, b 44) On ne peut plus parler de procès condition – ni de procès résultat – quand seule demeure la charnière si non qui unit l’énoncé du premier procès non réel et celui du procès réel nécessairement introduit par que . Et il nous faut étudier le fonctionnement de cette construction. Dans les deux exemples qui suivent : La tercera [batalla] fue cercal rio Tisin quando [Annibal] lidio con Cipion, consul de Roma, e uenciol e fue y llagado Cipion, e muriera en la batalla, sino quel saco della su fijo Cipion el mancebo , que auie estonce XXI anno. (p. 17, b 35) Otrossi alli fue muerto Laudarigo, cormano de Athila. E partieron se estonces los godos de los alanos, et cometieron a los vgnos, et enuayron los, et fuera y muerto Athila, si no que fuxo a las tiendas ; et ueyendo las mortandades muy grandes, metios tras la guarda que auie el fecha de carros et de çarzos. (p. 236, a 3) un premier procès aurait pu avoir lieu comme le laissait craindre son contexte : [ Cipion ] muriera en la batalla ou fuera y muerto Athila . Mais c’est le second procès, réel, qui s’est produit et qui a empêché l’existence du premier : saco [ le ] della su fijo Cipion el mancebo ou fuxo a las tiendas . Et ainsi, nous avons un premier procès non réel et un second, réel, qui a existé à la place du premier. Un dernier exemple nous montre une situation dif-férente : Este rey don Fernando el Magno […] fue omne derechero et temient a Dios et temient de su alma, et muy ardit en lit. Et tan grand era el miedo que dell auien los moros que luego, a poco de tiempo desque el regno, ouiera conqueri-das quantas tierras ellos tenien en Espanna, sinon que se le estoruo por quanto ouo de asses-segar antes los grandes bollicios que se le leuantaran en su regno de algunos de sus altos omnes que se le querien alçar et non le querien connoscer sennorio . (p. 483, b 4) L’actant : este rey don Fernando el Magno aurait accompli le procès : ouiera conqueridas quantas tierras ellos [ los moros ] tenien en Espanna et les circons-tances le poussaient à le faire. Mais un obstacle, se le estoruo , s’est pré-senté : à la place de ce premier procès, qui est donc resté non réel, il a dû en effectuer un autre plus urgent : ouo de assessegar antes los grandes bollicios que se le leuantaran en su regno… et qui est le procès réel. Ainsi, quelque soit le contenu sémantique de leurs énoncés, nous avons toujours un procès réel qui s’est substitué à l’autre procès en l’empêchant d’exister. Et on peut considérer que la charnière si non que sert à marquer cette relation de substitution établie entre les deux procès, non réel et réel. En somme, cette nouvelle phrase conditionnelle présente trois variantes qui apparaissent uniquement dans les énoncés de la condition non remplie et du procès réel.
        « - » 
1. SI NO FUESSE POR so fijo Cipion Cipion muriera en la 2. SI NON POR el mancebo que batalla SALUO POR le saco della. 3. SI NON quel saco della su fijo Cipion el mancebo.
La variante 1 correspond à la phrase conditionnelle complète avec son premier procès non réel, sa condition non remplie exprimée par la for-mule : si non fuesse et son procès réel qui a empêché l’existence du pre-mier procès et auquel on donne la présentation d’une cause. Lorsque cette phrase s’allège, la formule perdant son verbe ou étant remplacée par saluo , nous avons la variante 2. Toutefois, cette variante n’est pas irréversible : le reste de la phrase ne change pas et l’on peut toujours compléter la formule ou la rétablir. Par contre, la variante 3 est une reconstruction plus synthétique de la phrase. Comme le procès réel a pour fonction d’empêcher l’existence du premier procès, cet intermé-diaire qu’est le procès condition disparaît et seul demeure l’énoncé du procès non réel auquel vient se rattacher, à l’aide de la charnière si non que…, celui du procès réel. Le procès non réel, obligé de s’adapter à cette nouvelle construction, conserve cependant sa forme en « -ra ». Et l’on constate que cette même forme, à l’opposé de la forme en -sse « » de la condition non remplie, a déjà étendu largement son emploi. En effet, nous la trouvons dans des procès non réels et passés entrant dans la composition de phrases qui ne sont absolument pas conditionnelles.
L                « - » Le premier cas que nous étudions n’apparaît que très rarement et dans une situation particulière. Ainsi, il arrive qu’un événement soit exécuté avec une telle intensité qu’il donne naissance à un nouvel événement : Estonce pararon sus azes damas las partes much acordadamientre e lidiaron e fue la batalla muy grande por que cada uno de los cabdiellos punnaua quanto podie de uencer ; pero en la postremeria esforçaron se tanto los romanos, e los espannoles que eran con ellos que fueron uençudos los dAffrica, e fuxo Asdrubal de la batalla … (p. 22, b 15) Or ce nouvel événement peut rencontrer un obstacle : un autre évé-nement qui survient dans le même temps et l’empêche d’exister : Ella repusoles que no era muger que quisiesse uender mercaderia, mas que
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